
Thèmes : le rebond du marché depuis les points bas de décembre, les prochaines étapes de la rivalité entre la Chine et les États-Unis, et une question pour Marco Rubio
« Short people ». Le 26 décembre à 8 heures, nous avons envoyé un « Baromètre du marché baissier » montrant que les valorisations des actions et des obligations étaient tombées bien en deçà de leur niveau médian historique et que dans le passé, les marchés rebondissaient généralement après des baisses aussi brutales. Nous écrivions que le pessimisme des investisseurs était intégré et que les prix de fin décembre offraient une valeur attrayante pour les investisseurs à long terme, en particulier compte tenu de la flambée des comptes « spéculatifs » qui vendaient à découvert des actions durant les jours précédant Noël dans un contexte de marchés très étroits. Comme vous pouvez le constater dans le graphique suivant (à gauche) (basé sur les données de notre activité de prime broker), les actions ont rebondi rapidement avec la couverture des ventes à découvert ; et ce, plus rapidement qu’après n’importe quel autre marché baissier depuis la Seconde Guerre mondiale. Le graphique suivant (à droite) confirme l’absence jusqu’ici d’opérations d’intervenants de la sphère réelle de l’économie, ce qui est remarquable. Le troisième graphique montre que les valorisations des actions et des obligations d’entreprises avoisinent aujourd’hui leur niveau médian, après les montagnes russes de 2018.
En miroir : le marché actions rebondit avec la couverture des ventes à découvert

Le rebond du S&P 500 ne s’accompagne pas d’opérations d’intervenants de la sphère réelle de l’économie

Valorisations des actions et des obligations. Centile vs les niveaux historiques

Les modèles de la Réserve fédérale semblent indiquer que des taux directeurs d’équilibre auraient besoin d’être supérieurs de seulement 50-100 points de base à l’inflation

Le marché bénéficie d’un soutien supplémentaire important apporté par la Réserve fédérale, qui a mis fin à ses hausses et semble prête à attendre et se mettre en position d’observation. J’attribue cette nouvelle patience de la Réserve fédérale à une combinaison des éléments suivants : (a) la recherche problématique de la Réserve fédérale présentée dans le graphique précédent semble indiquer une baisse du taux d’intérêt réel requis de l’ordre de 50-80 points de base, et (b) des craintes excessives de la Réserve fédérale concernant des mouvements erratiques du marché / un harcèlement par le Président. Les taux directeurs réels de la Réserve fédérale restent légèrement inférieurs aux niveaux d’équilibre donnés par les modèles de la Banque centrale, et si le marché du travail continue de se tendre (les offres d’emplois ont atteint un niveau record en décembre), la Réserve fédérale sera confrontée à des choix plus difficiles plus tard dans l’année. Nous pensons qu’un autre relèvement se prépare.
Nous mentionnions également une raison technique propice à un rebond du marché : la contraction de l’univers des actions cotées. Ce type de contexte technique n’empêche pas la baisse d’un marché, mais contribue à instaurer des conditions favorables après un désengagement lorsque les investisseurs institutionnels importants opèrent un rééquilibrage.
Un indicateur de substitution de l’offre d’actions américaines. Diviseur de l’Indice S&P 500

De nouvelles mesures de relance budgétaire sont en de préparation en Chine. % du PIB

Les bénéfices ont augmenté en 2018, mais les indicateurs avancés des bénéfices prévoient une croissance faible, voire nulle en 2019

Révisions des bénéfices des entreprises du S&P 500. Nombre de révisions à la hausse diminué du nombre de révisions à la baisse en % du nombre total de sociétés

Conclusion : nous n’apportons pas de changement majeur à la stratégie d’investissement que nous recommandons pour 2019, qui prévoit des allocations au risque normales. Le désengagement de décembre était une période propice pour faire fructifier l’argent, et les marchés ont considérablement rebondi depuis, ramenant les valorisations à peu près à la médiane. Nous n’anticipons pas de risques importants de récession aux États-Unis cette année, mais nous prévoyons un net ralentissement de la croissance des bénéfices par rapport à 2018, dans un contexte de tassement à 2 % de la croissance du PIB américain d’ici la fin de l'année. Toutefois, une politique de compromis de la Réserve fédérale et une relance en Chine pourraient porter les valorisations vers les points hauts de 2018, malgré les conséquences déstabilisatrices que ces politiques pourraient avoir à long terme, auquel cas les investisseurs en actions continueraient à engranger des rendements positifs jusqu'à la fin 2019. Comme indiqué dans les Perspectives, nous privilégions les marchés émergents par rapport à l'Europe, car ils offrent des opportunités en termes de valeurs fortement décotées ; notre surpondération, souvent analysée, des actions américaines et émergentes par rapport aux actions européennes et japonaises surperforme une fois encore cette année. Si la tendance se poursuit, ce serait la 10e des 13 dernières années à le faire.
Les prochaines étapes de la rivalité entre la Chine et les États-Unis : un recours plus offensif à des contrôles à l’exportation
Les États-Unis se préparent à recourir beaucoup plus énergiquement aux contrôles à l'exportation pour empêcher les entreprises chinoises d'avoir accès à la technologie américaine. Ces contrôles limitent les ventes transfrontières, y compris par des entreprises d'autres pays dont les produits comprennent des composants américains. Même le transfert d'informations à des ressortissants étrangers peut être considéré comme une « exportation présumée » ; autrement dit, les ressortissants chinois travaillant aux États-Unis pour des sociétés américaines du secteur de la technologie pourraient devoir être écartés de projets liés aux technologies « émergentes » et « fondamentales » telles que définies par le ministère du Commerce. Exemples : la biotechnologie, la neurotechnique, l’informatique avancée, l’apprentissage machine, la robotique, l’hypersonique, les matériaux avancés et la surveillance, etc.
Basé sur l’Export Control Reform Act (HR 5040), Gavekal Dragonomics Research
Une question pour Marco Rubio
« Lorsqu’une entreprise utilise ses bénéfices pour des rachats d’actions, elle décide qu’il est préférable de restituer du capital aux actionnaires plutôt que d’investir dans ses produits ou sa main-d’œuvre. »
Marco Rubio, décembre 2018
La question est rhétorique, mais je la pose quand même. Marco Rubio a proposé de modifier la législation fiscale américaine afin que chaque fois qu'une société rachète des actions, un dividende imputé soit perçu par tous les actionnaires, qui seraient imposés au taux d’imposition habituel sur leurs dividendes, quel qu'il soit.1 La présomption sous-jacente est que les entreprises opèrent des rachats d’actions plutôt que d'embaucher du personnel et d'investir dans des immobilisations corporelles, de sorte que le gouvernement devrait décourager les rachats pour promouvoir l'emploi et l’investissement. Laissons de côté les arguments du financement des entreprises (bien que la plupart des économistes que je connais déclarent que les entreprises ont tout intérêt à se développer, surtout compte tenu de la baisse des taux de l’impôt sur les sociétés). Plus concrètement, quelles sont les données que le sénateur Rubio examine et qui indiquent une faiblesse dans l'embauche ou dans les dépenses d’investissement ? Les États-Unis viennent d'enregistrer un nombre record d’offres d’emplois en décembre et, comme le montre le graphique suivant (à droite), toutes les grandes catégories d'investissements non résidentiels aux États-Unis augmentent, pour beaucoup plus rapidement qu'avant 2016 du fait des évolutions législatives qui ont suivi les élections, et ce malgré une guerre commerciale contre laquelle les Républicains au Sénat ont fait peu d’efforts pour lutter efficacement. C’est juste une question.
Taux d’emplois vacants

Investissement non résidentiel aux États-Unis. Indice, décembre 2011 = 100, données jusqu’au 3e trimestre 2018
